En mars, bégonias au balcon et récolte des oignons !
Après tout ce qu’elle a enduré, tout ce qu’on lui a fait avalé, tout ce qu’elle a pris en pleine figure, notre Planète nous donne encore. C’est pendant le confinement que je me suis lancée dans un potager.
L’expérience avait pourtant mal démarré. J’avais repéré un petit coin de terre dans le jardin, j’étais excitée et pleine d’énergie. J’ai entamé quelques pas de danse et je me suis mise à ramasser les cailloux, histoire de permettre aux carottes, navets et radis de serpenter dans le sol sans obstacle. Fredonnant un air à quatre temps, j’ai développé une petite chorégraphie alternant flexion et ramassage de caillou. Hop, hop, le caillou dans la main, hop, hop, le caillou lancé sur le chemin. La souplesse m’envahissant, j’ai soigné mes sautillements en prolongeant les mouvements, en lançant de plus en plus loin. Expiration, inspiration, rotation, flexion, tension, attention… et l’ultime caillou est parti loin, loin, dans la roue d’un vélo vagabondant sur la piste cyclable.
À terre, le cycliste m’a d’abord incendiée : « Ça ne va pas ? Vous êtes complètement folle ! J’aurai pu… J’aurai pu… Tomber plus fort ! ». Puis, relevé et calmé, il m’a demandé ce que je faisais à 8 heures du matin à lancer des cailloux vers la piste. Regardant le futur potager, il a juste dit : « Mettez un peu de compost car votre terre est trop sableuse. Ni vos carottes ni vos fraises ne seront pleinement heureuses. »
Sans réaliser qu’il avait fait une rime !
« Mais vous, vous y connaissez ! Vous pourriez me conseiller. Je vous écoute. »
Rémi a ôté ses gants de cycliste et pris une poignée de terre pour en respirer son odeur. Il a gratté un peu pour observer la présence des vers de terre. Pointant du doigt les allées futures, il m’a indiqué quels légumes et fruits mettre ici, pourquoi planter du romarin et comment préserver le potager des courants d’air. Les mains sur les hanches, droit comme un poteau, il a déroulé tout son savoir sur la rotation des cultures et le calendrier des semis, il a parlé de paillis, de bâche, de grelinette et d’ensilage. Après avoir avalé son café froid, il a repris son vélo et me lançant un « et plus de caillou sur la piste ! » sur un ton à mi-chemin entre clin d’œil et coup de gueule.
Il est repassé quelques semaines plus tard, apportant fièrement des tomates rouges et des fraises, des carottes pleines de sable et quelques salades frisées aux feuilles légèrement brunes. « Alors, et vous ? » Mes premières récoltes ne pouvaient pas rivaliser. Autour d’un café, il m’a raconté combien il aimait aller chez ses grands-parents le week-end où il aidait son grand-père à entretenir le potager. Les fiches de semis bien rangées dans une boîte à chaussures, aucune place pour le hasard. Il se souvient encore du goût du radis noir, des panais et du melon tellement sucré.
« Le potager, une nécessité ? Nos vieux ne se posaient même pas la question ! Le potager, c’est pour bien se nourrir, rester en forme car ça demande un peu de physique, passer du temps au soleil sans y laisser sa peau, respirer en plein air et regarder les oiseaux, apprendre à attendre l’été pour manger des framboises et l’hiver pour manger des endives. »
Jardins partagés, potager sur le balcon ou seulement tomates-cerises et basilic dans quelques pots en terre cuite, lancez-vous et observez votre sourire quand les premières pousses apparaitront ! Le potager, c’est le rythme de la vie.
En mars, semez et plantez presque tout ce que vous voulez !
Paula Serrajent
Pour découvrir plus d'articles
Abonnez vous et recevez le journal en version papier et/ou numérique.