Le Shifumi

Fin des vacances. Reprise des choses sérieuses. Quoique. Les vacances sont, elles aussi, devenues des choses sérieuses. Préparatifs minutieux, destination, durée, budget, bagages… rien n’est laissé au hasard. Même si de multiples coïncidences offriront de l’inattendu pour les uns, du désagrément pour les autres voire des catastrophes semi-naturelles comme l’a une nouvelle fois démontré cet été devenu pour de nombreux vacanciers un véritable enfer.

Sans abuser des expressions et autres jeux de mots, on peut constater qu’au fil des ans, on n’y a vu que du feu et, jurant d’y mettre la main au feu, on était convaincu que nous dominerions la nature en général et l’humain en particulier. On a mis le feu aux poudres et désormais, nous trouvant pris entre deux feux, il ne nous reste plus qu’à faire feu de tout bois pour sortir de l’embrasement général.

On joue avec le feu depuis des décennies. Les arbres et les maisons disparaissent sous les flammes. Feuilles et pierres. Comment couper court à cette ascension ? Ciseau !

Qui n’a pas joué au feuille-pierre-ciseau ? Ce jeu d’origine chinoise date de 206 avant J-C. Il s’est diffusé énormément en occident. Il existe une très sérieuse association américaine organisatrice d’un championnat du monde. Basé sur le hasard, le jeu contient plus de psychologie qu’il n’y paraît. Le joueur utiliserait rarement plus de deux fois le même objet. Ainsi, si votre adversaire joue « feuille » deux fois de suite, ne sortez pas le ciseau au troisième coup ! Vous perdriez !
Souvent, le joueur utilise l’objet qui l’a fait perdre
au tour précédent… en surveillant bien le déroulé d’une partie, vous vous doterez de chances supplémentaires pour gagner.

Au fil du temps, un puits s’est immiscé dans la trilogie. Pourquoi ajouter le puits ? Cet objet, non reconnu par l’organisateur des championnats du monde, gagne sur la pierre comme sur le ciseau. Il casse tout le principe du jeu dont la mécanique est circulaire : la feuille enveloppe la pierre qui casse le ciseau qui coupe la feuille.

Jouer est un excellent levier d’apprentissage, d’échange intergénérationnel et de détente. Le jeu développe l’esprit critique, le sens du calcul et de la stratégie, l’observation et l’écoute, l’attention et la réflexion. Jouer, c’est prendre des risques mesurés, c’est parfois devoir bluffer pour gagner, c’est toujours respecter la règle pour réussir.

Le jeu du shifumi est à l’image de notre planète  : impossible de préserver un équilibre naturel, il faut toujours qu’on y mette notre grain de sel qui devient vite un grain de sable. Je vous invite à en rester au grain de folie.

Joli mois de septembre qui nous invite à découvrir notre patrimoine fait de pierres et de feuilles, de bâtisses incroyables et de forêts plus fragiles qu’on ne le croyait.

Paula Serrajent