Chaque année, de 1925 à 1943, se déroulait un raid hippique à travers nos collines. Cet évènement était organisé par la Société hippique bastidienne fondée en 1924 dont le siège était au café Mazarin, 4 avenue Thiers à Bordeaux Bastide. 

 

Cet évènement s’étalait sur trois jours et se décomposait en quatre épreuves : un grand raid sur route réservé aux chevaux attelés, un petit raid consistant en une course d’ânes, une course de poneys (maximum 1,35 m au garrot) et un concours d’attelages de 1 à 3 chevaux dans la catégorie « camion » et « baladeuse ». La compétition se déroulait en trois étapes de 185 km environ au total suivant des itinéraires différents chaque année. Les routes dangereuses étaient évitées. 

Au départ,  place du Pont (place Stalingrad), 25 à 35 concurrents allaient prendre le départ officiel à la deuxième barrière ou au pont rouge à Cenon. Voici par exemple un itinéraire d’une étape : Bordeaux La Bastide – Cenon, La Benauge, les Bons Enfants, Créon, La Sauve, Langoiran, La Tresne, Bordeaux. Le règlement était strict : la compétition des chevaux attelés devait se faire au pas ou au trot (le galop étant disqualifiant), l’emploi du fouet interdit, seule la cravache était autorisée avec modération. Tous les types de voitures étaient acceptés. Les concurrents venant de tout le Sud-Ouest en train, avec leur monture, bénéficiaient d’une remise à l’aller et le retour était gratuit. L’engagement à ce raid variait de 25 à 75 francs et donnait droit au banquet final. A chaque départ et arrivée, l’ambiance était assurée par les trompes de chasse des Veneurs bordelais.

L’organisation de ce raid était parfaite grâce à tous les bénévoles : chronométreurs, juges, commissaires, vétérinaires. La distribution des numéros se faisait devant la mairie de Cenon, la visite vétérinaire place Montesquieu et la remise des colliers plombés à l’angle de la rue du Maréchal Joffre et du cours Victor Hugo chez le bourrelier/sellier. Aucun accident ne fut à déplorer si ce n’est le renversement de quelques attelages un peu trop fougueux, quelques emballements intempestifs et des chevaux déferrés. La moyenne des étapes était de l’ordre de 25 km/h. Chaque année cet évènement attirait une foule considérable notamment en 1925 quand l’épreuve se déroula du samedi au lundi de la Pentecôte conjointement avec l’élection de la rosière à Créon. Ces courses étaient dotées de prix importants 35 000 francs au total (5 300 euros) et en 1928 le président de la République Gaston Doumergue offrit un magnifique vase de Sèvres tiré au sort parmi les participants ayant terminé la course. Chaque année une souscription était lancée pour gagner par tirage au sort un lot conséquent (un attelage complet). Sur la page hippique des journaux qui relataient ce raid on note des noms amusants de participants, souvent des commerçants bastidiens : «Huilor», «Café Mazarin», «Anis le bistrot», «Pour rire», «Amourette», «La mélasse Bertin» etc…

 Puis, cet évènement spectacle prit fin en 1943 pour des raisons sécuritaires et aussi économiques. Les routes étaient de plus en plus encombrées avec des aménagements modernes rendant de plus en plus dangereux le passage des attelages ce qui amena les organisateurs à abandonner. L’automobile supplantait l’hippomobile. 

Gilbert Perrez

©Gilbet Perrez