Ediluezia Gallet ©Danièle Heyd
Le 4 décembre 2021 a eu lieu à Créon, au bar de l’Entre 2 Mondes, un Café Mortel, organisé par la coopérative funéraire Syprès, qui a fait le choix de l’économie sociale et solidaire.
Fondée en 2019 par Ediluezia et Olivier Gallet, l’entreprise funéraire Syprès ne se contente pas d’organiser des obsèques écologiques, elle veut aussi changer le regard sur la mort.
Contre le marché privé de la mort
En 2013, Mme Gallet, psychanalyste, se forme en Suisse aux rites funéraires laïques afin d’intervenir dans des obsèques, à la demande, mais se heurte au refus des entreprises de Pompes Funèbres. Elle décide, en s’inspirant d’une expérience genevoise, de libérer la parole en proposant le Café Mortel, un espace convivial où en groupe, chacun parlera de son expérience de la mort. En écoutant les gens, elle s’aperçoit qu’il faut changer le service funéraire car dans l’état actuel, l’accompagnement à la mort pose question. Aidés par des bénévoles, M.et Mme Gallet proposent une approche différente et vertueuse. « Les funérailles ce n’est pas de la marchandise, c’est dire adieu à celui qui s’en va » dit Olivier Gallet. Le couple va s’inspirer de ce qui se passe au Québec pour créer la coopérative funéraire, Syprès, au nom évoquant à la fois, l’arbre des cimetières et la proximité avec la famille en deuil. C’est avec cette dernière qu’ils organisent la fête d’adieu en l’honneur du défunt
Créer des espaces d’échanges
Parler de la mort, c’est difficile et ça fait souffrir. C’est pourquoi Syprès organise dans des lieux de rencontres, une série d’événements comme par exemple, le Café Mortel. L’animatrice pose sur une table une bougie allumée en souvenir des morts du groupe et fait passer une plume de couleur bleu nuit pour gérer la prise de paroles. À sa base un hibou, oiseau de nuit ou symbole de sagesse ? À Créon, 10 personnes, venues de partout, se sont réunies de 17h à 19h dans le bar de l’Entre 2 Mondes pour briser le tabou social de la mort. Premier débat : la couleur de la plume, vue comme noire par tous et la mise en question des signes de deuil. Comme réponse, un Hollandais a évoqué la volonté, dans son pays, de placer la mort dans le cycle de la nature : cimetière paysager, cercueil en bambous enseveli en pleine terre, nom du défunt sur un tronc d’arbre. Ont suivi trois témoignages sur la violence du choc ressenti lors du départ du cercueil pour le four crématoire ou la fosse commune ! Une jeune femme a parlé longuement de l’éloge funèbre de son père, qui par la magie des paroles avait fait revivre le défunt dans tous les cœurs. Cette communion de l’assistance avait facilité l’instant fatal de la séparation. Autres sujets abordés : préparer sa fin de vie, pacifier sa succession avant sa mort et cas extrême, organiser minutieusement ses propres funérailles ! Mme Gallet, à l’écoute des témoignages, participait aux échanges en donnant des conseils.
« La vie, la mort, le deuil, on ne mourra pas d’en parler ! » c’est le slogan des rencontres proposées par Syprés.
Danièle Heyd
Briser le tabou social de la mort
La plume qui sert à prendre la parole ©Danièle Heyd