BERLIN REQUIEM, de Xavier-Marie Bonnot (Éditions Plon)

Ce roman est une méditation sur la place de l’artiste et son engagement, dans la société, surtout si, comme en 1933, en Allemagne, celle-ci est empoisonnée par le nazisme. Trois destins liés à l’univers de la musique vont se croiser et chacun va choisir l’attitude à adopter face à Hitler et sa clique. Le premier, Wilhem Furtwängler, est un chef d’orchestre réputé qui ne vit que pour la beauté de la musique sans voir qu’il se compromet avec les nazis alors qu’il les méprise. La seconde est la soprano Christa Meister qui, dès la nuit des Longs Couteaux, a saisi la noirceur du régime. Elle fuira en France mais le passé juif d’un de ses ascendants la conduira à Birkenau. Le troisième est Rodolphe, le fils de Christa, de père inconnu, qui va se révéler un jeune chef d’orchestre talentueux. Le lecteur suit le parcours de chacun jusqu’à la chute de Furtwängler après la guerre et sa rencontre avec son successeur, Rodolphe Meister. Le coup de théâtre final montre le triomphe de la musique sur les aléas de la vie.

Danièle Heyd

LA MARCHE DE RADETZKY, de Joseph Roth (Éditions Seuil)

La marche de Radetzky de Johann Strauss est une marche militaire entraînante, illustrant la grandeur de la monarchie austro-hongroise. Or, dans ce roman, de l’auteur autrichien Joseph Roth, paru en 1932, son évocation se teinte d’ironie. Temps fort du roman, cette célèbre marche ne peut cacher le délitement de l’Empire que Roth décrit à travers la saga des Von Trotta. Au départ, cette famille, d’origine modeste vit dans le village Slovène de Sipolje. À la bataille de Solférino (1859) le sous-lieutenant Trotta sauve la vie de l’empereur François-Joseph qui l’anoblit. Il devient capitaine, baron Von Trotta de Sipolje et se fait portraiturer. Cette ascension subite va marquer ses héritiers, chaque fois qu’ils regarderont son portrait et que des marques de la faveur impériale se manifesteront. Cha-cun des descendants va illustrer un aspect de cette monarchie jusqu’à sa disparition en 1914. Le roman est truffé de symboles pour dénoncer le mythe de la grandeur de l’Empire dont la célèbre marche de Radetzky perpétue l’image trompeuse. Bref un superbe roman.

Danièle Heyd